Au fil des lectures : reçu 10/10

juillet 2019

« Une vérité appartient, non pas au premier qui la dit, mais au premier qui la prouve. » (traité 1ère ed.)

Jacques de Larosière. « Les 10 préjugés qui nous mènent au désastre économique et financier ». Odile Jacob.

10_prejugesÀ presque 90 ans l’ancien directeur du FMI (Fonds Monétaire International), puis gouverneur de la Banque de France nous livre une analyse sage, simple et complète des principales erreurs commises dans le pilotage des politiques monétaires et budgétaires de nos pays. A l’instar de Say, Larosière cherche une vérité argumentée et s’oppose à l’abondance des savoirs qui se conjugue avec la pauvreté des raisonnements. Comme si l’immense quantité d’informations dont nous disposons pour comprendre le monde submergeait nos capacités de traitement, réduites à ne fonctionner qu’avec des préjugés.

Revenant sur la crise financière de 2007-2008 et la terrible récession qui l’a suivie, l’auteur souligne la responsabilité première et immense des banques centrales et en particulier de la FED : une politique trop souple (qui laisse se développer trop de crédits, avec des taux d’intérêt trop bas), une supervision défaillante et un assouplissement des contraintes réglementaires encourageant tous les excès.

Il montre que la politique de taux zéro, voire négatifs, qui a suivi la crise, ne peut être que transitoire et qu’à durer trop longtemps elle agit comme une drogue : les crédits trop bon marché font monter artificiellement la valeur des actifs qui permettent de s’endetter encore davantage. Elle dispense les États d’ajuster leurs politiques budgétaires en rendant indolore le gonflement de la dette par l’accumulation des déficits. Enfin, agissant comme une trappe à liquidité, elle dissuade les investissements (autant conserver ses liquidités que de les investir à un taux de rendement trop bas pour compenser les risques : inflation ou défaut).

Concernant la politique budgétaire justement, Larosière montre qu’en période de croissance le recours aux déficits ne nourrit pas celle-ci. En France, les dépenses publiques sont passée de 40% du PIB en 1974 à 57% aujourd’hui, sans avantage en termes de taux de croissance, d’emploi, de sécurité, d’éducation par rapport à d’autres économies n’ayant pas pris cette pente. On le sait, celle-ci génère une augmentation de la pression fiscale qui finit par amoindrir la compétitivité des entreprises. Et celles-ci perdent leurs moyens d’investissement, donc d’améliorer leur productivité. Ce qui a conduit à la disparition de la moitié de l’industrie française en une génération.

Traitant également des excédents allemands qui doivent être réduits, du gouffre de nos retraites, de l’absurdité des normes comptables, Larosière s’en prend donc aux différents « consensus » inspirant le pilotage des politiques publiques depuis une quinzaine d’années. Pour qui veut s’instruire facilement, la lecture de ce traitement honnête des sujets graves concernant l’avenir de notre prospérité s’impose absolument. A l’heure où tant d’erreurs ou d’imbécilités trouvent tellement d’échos, sa diffusion mériterait le plus grand élargissement. Si vous n’avez pas été assez généreux à Noël, vous savez maintenant quoi offrir à vos proches !

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