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février 2024

« L’économie : il y a peu de sujet sur lequel on se soit plus donné carrière pour déraisonner » (traité 1ère ed.)

Les paradoxes du solaire chinois

Les ambitions européennes de réduire les émissions de gaz à effet de serre, on le sait, doivent conduire la zone à décarbonner sa production d’énergie et assurer notre souveraineté dans ce domaine. Le solaire présente de ce point de vue un intérêt apparemment incontestable. Au cours des trois dernières années le déploiement a permis de doubler le parc existant. D’ici 2030 l’ambition est de tripler ces capacités, ce qui représenterait une superficie équivalente à 300 000 terrains de football. Néanmoins 95 % des modules installés en Europe proviennent de Chine qui domine le marché mondial avec des prix imbattables. Rappelons qu’au début des années 2010, les producteurs européens ont tenté de lutter contre les prix asiatiques et ont obtenu des restrictions aux importations. Le déploiement du solaire a ralenti en conséquence, perdant son avantage prix.

La levée des restrictions en 2018 a provoqué une reprise des investissements encouragée par la hausse de prix de l’électricité qui a suivi l’invasion de l’Ukraine début 2022. Les rares producteurs européens demandent à nouveau des restrictions tarifaires ou des subventions pour faire face aux concurrents chinois qui livrent pour la moitié de leurs prix. Il est vrai aussi qu’un tiers des inputs d’un panneau solaire provient de la province du Xinjiang, région de l’ouest agitée où le travail forcé semble pratiqué. Et bien sûr, la dépendance à l’égard de ce fournisseur unique met l’Europe dans une situation de fragilité comparable à celle qui l’a liée au gaz russe. Enfin, ce quasi-monopole chinois pourrait aussi conduire à une hausse des prix une fois les producteurs européens éliminés.
Le nombre d’exemples est abondant depuis une vingtaine d’année dans l’industrie européenne.

Pourtant il faut avoir à l’esprit que la durée de vie d’un panneau solaire est d’environ trente ans, même s’il aura perdu environ 15 % de sa productivité après 20 ans. Vingt, trente ans c’est aussi le temps nécessaire au redéploiement du nucléaire, à l’émergence de l’hydrogène vert. Le 6 février la Commission Européenne a même annoncé un nouvel objectif de réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040. Mais ne compte pas les émissions de CO2 générées par nos importations… Pas inquiète d’une injonction contradictoire supplémentaire, la Commission donne aussi l’obligation de produire en Europe 40 % des technologies vertes dès 2030…

Tout cela illustre à nouveau bien l’absence de vision et de constance de la politique énergétique en Europe, qu’elle soit celle de la Commission ou celle des États membres. À vous de comprendre…

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