Analyse économique

juillet 2020

Pour produire plus, il ne faut pas travailler davantage, mais être davantage à travailler – La croissance et le travail en France
Reprise de la parution de mai 2019

Alors que certains annoncent fièrement que la croissance en France sera probablement supérieure à celle de l’Allemagne en 2019, il est bon de regarder le graphique ci-dessous pour prendre la mesure du décrochage de notre économie par rapport à celle de notre voisine. Exprimée par habitant ce décrochage est encore plus manifeste puisque le PIB par habitant, identique dans les deux pays à 32 400 euros en 2008 est passé à 35 110 en Allemagne (+ 8,3%) et à 33 100 en France (+2,2%).
Graph-1
Il faut bien garder à l’esprit que parallèlement à cette moindre progression, la dette publique rapportée au PIB baissait sensiblement en Allemagne alors qu’elle explosait en France : une croissance faible et artificielle en France et forte et réelle en Allemagne.
Graph-2
Si l’on produit moins, c’est que l’on travaille moins
Pourtant, malgré les 35 heures et nos jours fériés, la durée du travail en France, faible c’est vrai, à 1526 heures annuelles par rapport à 1746 en moyenne dans l’OCDE (13% de moins quand même), se compare à celle de l’Autriche ou des Pays- Bas et est même supérieure à celle de l’Allemagne !
Si le problème ne semble pas être la durée annuelle du travail, quel est-il ? La quantité de travail dépend certes de la durée de travail des travailleurs, mais aussi et surtout du nombre de travailleurs.

Et c’est le cœur du problème français :
Graph-3
Le taux d’activité est le rapport entre la population active (celle qui travaille, cherche un emploi ou est en formation) et la population en âge de travailler, définie comme celle âgée de 15 à 64 ans.

Le constat est simple :
Le taux d’activité en France est faible par rapport aux pays comparables. Cette faiblesse tient surtout à l’inactivité de 55-64, due à notre politique de retraites (voir la décade d’Avril 2019) et à l’inactivité des jeunes, imputable à notre politique d’éducation et de formation (abandon du système scolaire sans diplôme, engorgement des universités, effondrement de l’apprentissage). Cette faible activité des jeunes se retrouve dans les 3 millions de 15-34 ans, un quart de la classe d’âge, qui n’est ni en formation, ni en enseignement, ni en emploi. Dont 40% issus de l’immigration (nés hors de France ou ayant un parent né hors de France). C’est dire l’effort d’éducation et de formation en même temps que les incitations qui doivent être déployés pour intégrer cette jeunesse dans le monde du travail en proportion de ce qu’elle est dans les pays comparables au nôtre…

Car au total la quantité de travail produite en France est très insuffisante :
Nombre d’heures travaillées rapporté à la population totale (par an)
tableau_3
Pour retrouver une création de richesse suffisante afin d’éteindre les ressentiments et les frustrations que génère la stagnation, la France doit donc augmenter sensiblement sa quantité de travail produite en mettant (les jeunes) ou conservant (départs en retraites retardés) au travail une fraction beaucoup plus importante de sa population.

Mais être davantage à travailler ne doit pas empêcher non plus de faire travailler davantage ceux qui, dans la fonction publique (territoriale en particulier), ne travaillent pas le minimum d’heures légales…

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