Au fil des lectures : reçu 10/10

septembre 2016

« Une vérité appartient, non pas au premier qui la dit, mais au premier qui la prouve. » (traité 1ère ed.)

Jean Tirole – Économie du bien commun – PUF

Automne 2014 : Cocorico ! un français, le troisième, est couronné du prix Nobel d’Économie (en réalité le prix de la Banque de Suède en sciences économiques, décerné par l’Académie Royale). Oups ! Certains s’étranglent tout de suite : c’est l’analyse de Jean Tirole du pouvoir du marché et de sa régulation qui est illustrée. Elle a tendance à souligner la contribution positive des marchés à l’équilibre économique. Et voilà que notre libéral national nous offre un livre exigeant, mais destiné à un large public : nos médias en parleront moins que d’autres, mais nous voulons vous encourager à le lire vraiment.

Jean Tirole, dans « Économie du bien commun », nous offre une vision de ce que la société doit accomplir et le rôle des économistes dans la poursuite de cet objectif du bien commun. Il nous propose ainsi de nous placer derrière « le voile d’ignorance » :
« Dans quelle société aimerais-je vivre, sachant que je pourrais être un homme ou une femme, être doté d’une bonne ou d’une mauvaise santé, avoir vu le jour dans une famille aisée ou pauvre, instruite ou peu cultivée, athée ou croyante, grandir au centre de Paris ou en Lozère, vouloir me réaliser dans le travail ou adopter un autre de style de vie, etc. ? »

Jean Tirole souligne qu’il ne s’agit pas d’envisager naïvement une société idéale où chacun privilégierait « spontanément l’intérêt général au détriment de leur intérêt personnel », mais de reconnaitre que « nous réagissons tous aux incitations auxquelles nous sommes confrontés » qui peuvent être matérielles ou sociales. La recherche du bien commun a donc pour objectif de concilier l’intérêt individuel et l’intérêt général.

Dans ce contexte, la science économique peut contribuer à cette recherche du bien commun en aidant à distinguer les objectifs des instruments qui peuvent concourir à leur réalisation.
Comprendre l’économie est exigeant, car nos raisonnements s’arrêtent souvent aux apparences et aux émotions. La morale et l’indignation viennent souvent perturber la compréhension des phénomènes en amont, au lieu d’inspirer les règles en aval. Le rôle de l’économiste est de lier empirisme et théorie.

Le marché, les entreprises et l’État sont analysés de façon originale : l’entreprise n’est pas forcément moins responsable que l’État dans le développement du bien être ou du mal être collectif. Enfin, le message de Tirole est optimiste, il n’y a pas de fatalité et il existe des remèdes aux maux que nous connaissons. La bonne information et la bonne attitude vis-à-vis de l’information sont déterminantes.

« Ce dont je suis certain, c’est qu’on a les politiques économiques que l’on mérite et que sans culture économique du grand public, faire les bons choix peut requérir beaucoup de courage politique. Les politiques hésitent en effet à adopter des politiques impopulaires, car ils craignent la sanction électorale qui pourrait s’ensuivre. En conséquence, une bonne compréhension des mécanismes économiques est un bien public. »

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