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mars 2015

« L’économie : il y a peu de sujet sur lequel on se soit plus donné carrière pour déraisonner » (traité 1ère ed.)

Un peu de décence…

Ségolène Royal s’est cru autorisée à faire un commentaire moralisateur sur le « bonus de bienvenue » d’Olivier Brandicourt, le nouveau directeur général de Sanofi :

« Il faut un peu de décence, notamment de la part de laboratoires pharmaceutiques qui vivent de la Sécurité sociale, donc des cotisations sur les salaires… Les médicaments sont remboursés par les Français, donc c’est finalement tous les Français qui paient la Sécurité sociale qui vont payer les primes de bienvenue au patron de Sanofi. »

Ces remarques fines soulèvent plusieurs questions :

Est-ce que Sanofi vit vraiment de la Sécurité sociale ?
Seul 23% du Chiffre d’Affaire de Sanofi est réalisé en Europe de l’Ouest et moins de 10% en France. Il faut également noter que Lantus®, médicament contre le diabète et qui représente 1/6 du chiffre d’affaire de Sanofi , est remboursé à hauteur de 65% par la sécurité sociale française . Cette dernière, et donc les cotisations sur les salaires, ne financent donc Sanofi et son patron qu’à hauteur d’approximativement 6% !
Plus largement, il faut bien comprendre qu’une entreprise n’existe que parce qu’elle vend un produit que les consommateurs trouvent suffisamment utiles pour en payer le prix. Chaque entreprise versant un salaire à ses salariés ou ses dirigeants, on peut donc dire que tous les consommateurs financent le train de vie des tous les salariés de toutes les entreprises.

Est-ce qu’Olivier Brandicourt est trop payé et son « bonus de bienvenue » est –il nécessaire ?
Xavier Fontanet, dans les Echos du jeudi 5 mars, souligne à propos d’Olivier Brandicourt : « il perd des avantages acquis en prenant le risque de quitter un job magnifique chez Bayer où il a excellé, il accepte de sortir d’Allemagne pour rentrer dans un enfer fiscal, dont la rémunération totale est largement inférieure à celle de ses pairs … » En outre, «le chiffre est donné avant impôt (il faut donc le diviser par 2,5) et 80% sont variables » Et «passons sur les horaires, 3 fois 35 heures par semaine avec, à la clef, 750.000 kilomètres de voyage par an.»
Il est évident que lorsque l’on cherche à débaucher un dirigeant d’excellente réputation, il faut utiliser tous les arguments pour le convaincre. Au même titre que pour un salarié lambda approché par un cabinet de recrutement pour un nouveau poste, les critères de la qualité de l’entreprise, de l’intérêt de la fonction et la rémunération sont fondamentaux. .
S’il faut absolument trouver un coupable, nous pouvons nous poser des questions sur l’efficacité du conseil d’administration de Sanofi. Ne serait-il pas judicieux qu’il s’assure qu’un plan de succession existe déjà au sein de l’entreprise, ce qui lui éviterait de se tourner vers l’extérieur ? Et donc, de payer plus cher quelqu’un de la réputation d’Olivier Brandicourt pour assurer la direction de Sanofi ….

Est-il légitime pour un homme ou une femme politique de s’immiscer dans les discussions de rémunérations des entreprises du secteur privé ?
Il est vrai que Ségolène Royal qui vient d’abandonner le projet Ecomouv, pourtant adopté à l’unanimité par les députés après le Grenelle de l’environnement, fait supporter son coût d’1 milliard d’Euros aux contribuables. Payée par ceux-ci depuis sa sortie de l’Ena, comment la ministre compare-t-elle sa création de valeur à celle de M.Brandicourt ?

Appelons plutôt Jean-Baptiste Say :

« Lorsqu’on donne à certains le droit de juger de la manière de travailler d’autres, on s’expose à des jugements dictés par l’ignorance ou la routine, par la rivalité ou la prévention »

(Catéchisme p.99)

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