Au fil des lectures : reçu 10/10

janvier 2022

« Une vérité appartient, non pas au premier qui la dit, mais au premier qui la prouve. » (traité 1ère ed.)

Dictionnaire amoureux de l’entreprise et des entrepreneurs.

Sous la direction de Denis Zervudacki. Édition Plon.

Qu’il est bienvenu ce Dictionnaire Amoureux ! Alors qu’historiquement la culture économique et politique française aime positionner l’entreprise comme lieu d’exploitation et au centre des conflits, voilà que s’expriment des sentiments amoureux pour cette institution et ceux qui les dirigent ! Un vrai changement culturel serait-il en cours ? La lecture de ce recueil pourrait y contribuer si son lectorat s’étend bien au-delà de ceux qui sont convaincus de l’utilité non seulement économique mais aussi humaine de cette institution qu’est l’entreprise.

Différemment conçu des autres « dictionnaires » de cette collection qui laisse habituellement s’exprimer un cœur unique, celui-ci s’ouvre à un chœur de contributions d’entrepreneurs, de chef d’entreprises et d’intellectuels qui ont réfléchi à la constitution et au fonctionnement de cette matrice exceptionnelle de la prospérité collective et de la collaboration humaine.

L’orchestration de l’ouvrage se fait par plus de 100 mots d’entrée qui vont d’Amour à Ville en passant par Apprentissage, Argent, Croissance, Emploi, Éthique, Jaurès, Mérite, Patrimoine ou Travail etc. qui permet une lecture libre et thématique de chapitres courts et très accessibles écrits par des personnalités de notre vie économique récente : Xavier Fontanet (Essilor), Yvon et Pierre Gattaz (Radiall-Medef), Alain Mérieux, Gérard Mulliez, Jean-Laurent Bonnafé (BNPParibas), Pierre-André de Chalendar (Saint-Gobain), Vincent Bolloré etc.

On remarquera qu’il y a plus de chefs d’entreprises que de créateurs d’entreprises parmi les contributeurs et certains pourraient le regretter. Mais c’est oublier un élément essentiel de la vie de l’entreprise : si elle est dirigée par un manager, elle est condamnée. Le chef d’entreprise doit être un leader et un entrepreneur qui s’entoure d’entrepreneurs. « L’esprit de conquête avec ce qu’il comporte d’ambition est vital pour l’entreprise. Si on ne progresse pas, très vite on recule et alors l’entreprise disparait (…). La conquête doit porter sur de nouveaux territoires, des sciences et technologies de rupture, dans une ambition d’innovation permanente. Et cette ambition, l’entreprise doit la porter très haut, en donnant un cap, une vision, et surtout la faire partager par les hommes et les femmes qui la composent » écrit ainsi Alain Mérieux sous le mot « Conquérir ». On ajoutera qu’il peut y avoir d’autres ressorts à la croissance que l’innovation dans les produits ou services, la qualité par exemple -et toute forme d’innovation dans les process- qui permet de prendre des parts de marchés aux concurrents.

Les entrepreneurs sont donc au service d’une institution qui semble être la dernière à trouver grâce aux yeux de nos contemporains et qui voient la famille, l’école, les institutions religieuses et surtout les institutions publiques (État, collectivités locales, Éducation Nationale, organes de contrôle etc.) de plus en plus contestées pour leurs faibles résultats et par l’affirmation de la suprématie du sujet, de l’individu, sur toute collectivité.

L’entreprise reste aussi un des derniers lieux d’expression de la liberté : liberté d’imaginer, de créer : « plus que l’accumulation du capital (Smith et Ricardo), la lutte des classes (Marx), le protestantisme (Max Weber), les institutions, ou même l’idée bourgeoise, c’est la liberté dans ses infinies variations, offrant à celui qui a une idée de pouvoir la mener à son terme, qui explique sans doute le mieux la croissance économique, le développement du commerce et le fascinant recul de la pauvreté dans le monde. En creux de cette liberté d’entreprendre, c’est l’homme respecté qui voit le jour, chacun pouvant tenter sa chance, d’où qu’il vienne, quel que soit son parcours. » écrit Matthieu Laine à la rubrique Liberté.

Et on ajoutera que c’est l’entreprise -sans exclure d’autres circonstances- qui permet aussi par le travail reconnu et rémunéré de trouver pour chacun l’occasion de se former, de collaborer, de s’intégrer voire de s’élever, bref de conquérir aussi une part de dignité humaine.

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