Analyse économique

janvier 2022

La désindustrialisation de la France est-elle interrompue ?

La crise a été l’occasion d’une prise de conscience de la désindustrialisation de notre pays. Hélas, les dernières données montrent que la baisse du poids du secteur manufacturier dans le PIB français a continué de s’éroder. C’est aujourd’hui moins de 10% de la richesse nette qui provient de ces activités, ce qui fait de la France un des pays les moins industrialisés de l’Union Européenne. Bien que l’économie italienne représente seulement 72% du PIB français, la production manufacturière transalpine y est supérieure de 13%. La production manufacturière allemande représente 2,8 fois celle de la France.

Poids du secteur manufacturier dans le PIB

Comme le montre le graphique ci-dessus, la France avait interrompu depuis une dizaine d’années la baisse du poids de l’industrie qui s’était stabilisé autour de 10%, le plus bas niveau parmi les grands pays de la zone euro. Le décrochage des dix-huit derniers mois est-il le signe d’une nouvelle rechute ?

Il est trop tôt pour le dire. Cette baisse ne concerne pas que la France. Elle est aussi visible en Allemagne et s’explique en partie par les problèmes du secteur automobile lié aux difficultés d’approvisionnement en composants. Pour la France, elle s’explique sans doute aussi par la forte spécialisation de la France sur le secteur aéronautique qui a été touché de plein fouet par la crise du Covid et dont la production est inférieure de 29% au niveau qui prévalait en 2019. Par contagion, la métallurgie est également impactée. Les données de la balance commerciale confirment ce message : les biens de transports, secteur traditionnellement fortement exportateur, représentent à eux seul la moitié de la dégradation de la balance commerciale hors énergie.

Les données allemandes et japonaises tendent à montrer une normalisation de la production dans le secteur automobile. On devrait donc observer un rebond dans les prochains mois. Pour le secteur aéronautique, les perspectives sont dépendantes d’un retour à la normale post-Covid, sans doute plus éloigné. Une faiblesse durable de ce secteur constituerait une très mauvaise nouvelle pour l’économie française. En effet, il constitue l’un des rares secteurs en croissance sur les vingt dernières années avec le luxe et la chimie.

On peut néanmoins espérer que la récente dégradation de l’activité industrielle soit conjoncturelle et non structurelle. Toutefois, elle souligne la trop grande spécialisation de l’économie française dans un nombre trop limité de secteurs. Car c’est l’industrie qui permet le mieux, par l’innovation, de dégager des gains de productivité qui sont la principale composante de la croissance économique. Si l’on veut maintenir et développer notre prospérité collective il convient donc de remettre la production industrielle au cœur de nos ambitions. La réindustrialisation de la France reste donc un grand chantier devant nous et un challenge pour nos dirigeants.

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