Parole d’entrepreneur

juin 2019

François RAYNAUD DE FITTE, fondateur de PopChef

Après un double diplôme Droit français / Droit anglais entre King’s College et la Sorbonne, François obtient un Master de marketing à Sciences Po avant de rejoindre le MS Entrepreneurs de HEC.
À la suite de ses études, il fonde PopChef en 2015 avec Briac Lescure, start up proposant la livraison de repas faits maison à base de produits locaux et de saison. Popchef a livré près d’un million de repas depuis son lancement. François et Briac sont cités par Forbes dans son classement 30 under 30 en 2019.

1) Pourquoi être devenu entrepreneur ?

J’ai toujours ressenti un besoin important d’aventures et de me nourrir d’expériences fortes. J’ai beaucoup voyagé seul, j’ai tenté plusieurs défis sportifs comme la traversée de la Manche à la nage ou l’ascension du Mont-Blanc, toujours en quête d’une forme de dépassement. Pour moi, entreprendre est synonyme d’aventure, c’est une porte de sortie du traditionnel job de bureau dans lequel je ne me reconnais pas.

2) Le chef d’entreprise est-il le seul à entreprendre ?

Cela dépend des entreprises. S’il y a une distinction entre l’entrepreneur et le salarié, c’est généralement le chef d’entreprise qui instaure cette différence. Il ne faut pas « guru-iser » les entrepreneurs. Le salarié d’une entreprise très innovante aura parfois un impact largement plus important que le dirigeant d’une petite Startup.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu’aucun entrepreneur ne réussit seul. Derrière toute Success-story, il y a une équipe complète, composée de salariés et d’investisseurs qui ont donné beaucoup d’énergie et de temps pour atteindre ce résultat. Il y a une injustice dans le modèle actuel, qui rétrocède la plus grande partie de la valeur à l’entrepreneur et à l’investisseur le jour ou une startup se fait racheter, au détriment du salarié.

3) Pour vous, qu’est-ce que la création de valeur ?

La création de valeur ne devrait pas être comprise comme se limitant à la création d’une valeur économique ou financière. Tout le système fiscal est basé sur cette interprétation de la valeur comme valeur économique en oubliant toutes les externalités… Il faudrait considérer les entreprises, non pas comme des entités économiques créant uniquement de la richesse économique, mais comme des acteurs du monde : il faut donner un sens plus large à la notion de valeur. Il faut voir ce que la boite apporte au monde, quelles sont les retombées sociales, son impact environnemental et sociétal. À mon sens, la fiscalité devrait être basée sur cette définition plus large de la valeur pour prendre en compte les retombées réelles de l’activité exercée.

4) Quelles sont les trois ou quatre mesures à prendre pour améliorer
le développement des entreprises françaises ?

Ma définition de « développement » des entreprises n’est pas forcément une course à la croissance coûte que coûte, mais plutôt à un développement de l’impact positif des entreprises. Il faut une course à la qualité des entreprises plutôt qu’une course à la quantité:

Je suis pour le fait de repenser la notion de valeur pour lui donner tout son potentiel et aligner la fiscalité sur cette définition. Les entreprises qui améliorent le monde, créent de l’emploi qualifié et ont un impact écologique positif ne devraient pas subir les mêmes charges fiscales que les entreprises créant du travail précaire, polluant à outrance, ou se conduisant de façon irresponsable pour maximiser leurs bénéfices.

Encourager une meilleure répartition du capital chez tous les acteurs de l’entreprise, qu’il n’y ait pas seulement le chef d’entreprise et l’investisseur qui captent la valeur le jour ou une opération a lieu sur le capital. Les salariés participent tout autant à l’entrepreneuriat. Un capitalisme sain est un capitalisme mieux réparti.

Mettre en place un régime (social, fiscal…) similaire pour les entrepreneurs et les salariés afin d’inciter les personnes à entreprendre. De la même manière que cela n’a pas de sens de laisser l’entrepreneur capter toute la valeur de l’entreprise, cela n’a pas de sens de le laisser porter tous les risques. L’entrepreneur qui échoue connait une double difficulté : la difficulté morale et financière liée à l’échec, et l’absence complète de tout droits sociaux, notamment le chômage. Cela rend l’entrepreneuriat inaccessible pour toute une partie de la population.

raynaud_visuel

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