Parole d’entrepreneur

décembre 2020

Olivier Duchesne de Lamotte, fondateur de Biotraq

De la chaleur des marchés financiers au froid industriel…

Son diplôme d’école de commerce en poche, Olivier déroule sur les marchés financiers à partir de 1988, d’abord en tant que trader actions et dérivés – Banque Louis Dreyfus, Caisse des Dépôts, Deutsche Bank, ABN Amro – puis comme gérant chez Axa IM où il crée les premiers hedge funds.
En 2010 il reprend les études avec un MBA HEC et crée une nouvelle activité de conseil en stratégie et marketing pour les petites sociétés de gestion. Olivier les aide à revoir complètement leurs offres au sortir de la crise, et à mettre en place les outils de gestion de risque exigés par les évolutions réglementaires. Il accompagne ensuite une société spécialisée dans les modèles d’analyse technique dédiés aux hedge funds. Toujours « collé » à son secteur d’origine.

C’est son réseau HEC qui va le faire basculer pour de bon dans le secteur industriel en l’orientant vers une nouvelle mission auprès d’un spécialiste des « ITT » : les étiquettes Intégrateur-Temps-Température » qui permettent de vérifier que les produits frais sont consommables.
La plongée d’Olivier dans l’industrie de la chaîne du froid commence.
L’occasion pour Olivier de réaliser l’ampleur des gaspillages tout au long de la chaîne et l’opportunité d’améliorer les choses. L’importance sociétale de cette mission réveille de vieux souvenirs. Olivier avait déjà été confronté à cette problématique tout jeune lors d’un stage dans un hôtel africain où gaspillage et pauvreté l’avaient particulièrement marqué.
C’est l’idée de sortir d’un système binaire « bon » / « plus bon » avec un système intelligent IoT (Internet of Things ie internet des objets connectés) permettant de suivre et d’anticiper la péremption du produit qui sera la genèse du projet Biotraq.

Biotraq optimise la chaîne du froid, garantit la qualité des produits périssables et limite leur perte. En collectant et analysant les données de capteurs connectés embarqués sur les produits, Biotraq calcule leur qualité et apporte ainsi pour la première fois aux opérateurs des informations en temps réel sur l’état des produits dont ils ont la responsabilité.
Lancée en 2015 Biotraq est rapidement repérée par le Groupe La Poste qui l’intègre dans son programme French IoT et l’embarque au Consumer Electronics Show de Las Vegas en 2017. Biotraq est sélectionnée dans les «100 start-up où investir en 2018” de Challenges.
Biotraq “is on the map” !

1) Pourquoi être devenu entrepreneur ?

Après 22 années très riches, passées sur les marchés financiers, j’avais besoin de retrouver un espace de liberté et de créativité perdu dans les grosses institutions dans lesquelles j’avais travaillé.
Sans connaître l’étape d’après, je recherchais plus d’autonomie. La création d’entreprise est venue comme un choix évident. Un projet dans lequel je pourrais exprimer ma créativité naturelle, cette fois-ci mise au service de mon propre projet.

2) Le chef d’entreprise est-il le seul à entreprendre ?

C’est la nature du risque pris et l’adhésion au projet qui qualifient l’action d’entreprendre.
Un jeune diplômé qui décide de rejoindre une startup plutôt qu’un groupe établi prend aussi un risque.
De la même manière les salariés qui partagent la vision et la culture incarnées par le chef d’entreprise participent à l’action d’entreprendre, par opposition à ceux qui s’inscrivent plus simplement dans une mission qu’ils pourraient assurer ici ou ailleurs.

3) Pour vous, qu’est-ce que la création de valeur ?

Une entreprise ne peut pas vivre et poursuivre sa vision et sa mission sans argent. Donc la première création de valeur c’est son activité, son chiffre d’affaires et sa rentabilité pour subvenir à ses besoins d’entreprise : recruter, couvrir ses charges, investir, se développer, et rémunérer le risque.
Toute entreprise mettant en œuvre l’innovation au service d’un progrès, qu’il s’agisse de la lutte contre le gaspillage ou d’autre chose, crée de la valeur pour la société au sens large.

4) Quelles sont les trois ou quatre mesures à prendre pour améliorer le développement des entreprises françaises ?

a- Proposer une éducation économique pratique. C’est quand même extraordinaire de voir que les gens connaissent aussi mal le mode de fonctionnement de base d’une entreprise. D’autant que quand on leur pose la question, et en dépit de l’image négative souvent colportée par les médias, les gens déclarent en majorité aimer leur entreprise.
On n’apprend pas suffisamment tôt à l’école les bases pratiques du fonctionnement des entreprises.

b- Valoriser l’erreur, le droit à l’échec. On n’admet pas la valeur de l’échec. Contrairement aux États-Unis. Qui en France fait confiance à celui qui a connu l’échec ? Aux États-Unis l’échec est une étape valorisante sur le CV d’un entrepreneur.

c- Favoriser la prise de risque. L’écart entre l’assurance chômage du salarié et le risque maximum de l’entrepreneur est bien trop grand. L’entrepreneur est trop seul. Les bonnes idées ne manquent pas. Ce qui est plus rare est la capacité à bien exécuter. Parfois la prise de risque pour certains est trop élevée pour passer de la bonne idée à l’exécution. Comme on le fait pour l’entreprise avec la procédure de sauvegarde, on devrait protéger l’entrepreneur en phase de création pour lui permettre d’aller plus loin.

d- Développer le vrai capital-risque, celui qui finance les entreprises sous la barre du million de chiffre d’affaires qui aujourd’hui n’existe pas dans notre système français de financement.

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